Jurisprudence | Assurance invalidité

Le métier de femme au foyer : libre choix ou nécessité médicale?

Résumé

Atteinte dans sa santé depuis bien longtemps, Dame A dépose une demande de rente en novembre 2011, époque où son mari part à la retraite. Elle se déclare alors femme au foyer. L’Office AI (ci-après OAI) la considère comme telle et lui trouve, dans cette activité ménagère, un taux d’invalidité trop bas pour ouvrir le droit à une rente. Il estime que Dame A se consacre à son ménage par choix et ne se demande pas si, dotée d’une bonne santé, elle aurait travaillé. L’OAI reproche également à Dame A de n’avoir déposé sa demande que pour des raisons financières liées à la retraite de son mari et de ne pas avoir été proactive dans la recherche d’un emploi depuis que son fils est devenu indépendant. La rente est refusée. Dame A se plaint d’arbitraire, car l’OAI n’a pas tenu compte des multiples activités qu’elle a toujours exercées (vendeuse, caissière, concierge à 12%, marchés artisanaux entre 1973 et 2010), malgré ses atteintes  la santé. Le Tribunal fédéral (ci-après TF) lui donne raison et lui octroie une rente entière sur la base d’une incapacité de travail de 80% au moins dans toute activité. L’OAI aurait dû tenir compte de  l’état de santé défaillant de Dame A depuis l’adolescence et se demander ce qu’elle aurait fait si elle n’avait pas été atteinte dans sa santé depuis si longtemps, au lieu de la considérer comme une femme au foyer par choix. Il fallait donc examiner quelle aurait été son activité en novembre 2011 si elle n’avait pas été atteinte dans sa santé depuis 30 ans. Or il ressort des faits que Dame A a, tout au long de sa vie, sous réserve des années qui ont immédiatement suivi la naissance de son fils, exercé des activités professionnelles correspondant à sa mince capacité de travail. Dès lors son faible taux d’activité ne s’explique pas par un choix, mais reflète une capacité de travail réduite depuis des années. Le fait que Dame A se soit déclarée femme au foyer correspondait à sa situation en novembre 2011, alors elle était atteinte dans sa santé : on ne saurait en déduire une préférence. Au demeurant, Dame A avait déclaré lors de l’enquête ménagère qu’elle aurait exercé une activité à 100% pour des raisons financières et par choix si sa santé le lui avait permis. Selon le TF, les raisons financières qui ont poussé Dame A à solliciter l’AI une fois son mari à la retraite sont parfaitement naturelles, puisque la rente AI sert précisément à couvrir une incapacité de gain et à pallier un manque financier.

Commentaire

Salaire féminin salaire d’appoint : il y a lieu de s’inquiéter des préjugés persistants des  OAI pour lesquels une épouse ne saurait avoir d’autre raison de travailler que de compléter les revenus de son mari. L’OAI détermine si une femme en bonne santé aurait travaillé en considérant  la situation financière du ménage, l’éducation des enfants, l’âge, les qualifications professionnelles, la formation et les talents. Qu’en est-il de la volonté d’indépendance et de la participation à la vie sociale ?

Références
9C_722/2016 du 17 février 2017