Jurisprudence | Curatelles

Pas de curatelle de coopération inutilement intrusive

Résumé
Le 25 mars 2022, Dame A été mise sous curatelle de coopération (art. 396 CC) pour la conclusion de tout nouveau contrat notamment prêt, emprunt, achat de véhicule, d’ordinateur ou de téléphone portable, vente par acompte ou par correspondance. Dame A, qui souffre de troubles psychiques et qui a été victime d’un AVC ayant limité temporairement ses capacités, s’était lancée dans un commerce de concombres de mer séchés avec des pêcheurs du Cameroun ; elle y avait investi une part des CHF 100’000.- reçus d’un proche pour assurer le financement des études de médecine de sa nièce, n’avait pas de business plan et indiquait vouloir se rendre sur place en jet privé alors que ses moyens d’existence se résumaient à une rente AI et des PC. Ces faits, auxquels s’additionnait un placement à des fins d’assistance pour désorientation de la pensée, tentatives de fugue, agressivité et éléments de persécution, avaient suffisamment inquiété l’autorité de protection de l’enfant et de l’adulte (ci-après APEA) pour expliquer l’instauration d’une curatelle.

Dame A se plaint d’une violation du principe de proportionnalité et le Tribunal fédéral (ci-après TF) lui donne raison. La curatelle de coopération implique que les contrats passés par la personne protégée ne sont valables que si le·la curateur·trice y consent avant ou après leur conclusion. Dans le cas présent, même si la décision de curatelle donne une liste des actes nécessitant le consentement du·de la  curateur·trice, c’est en réalité la conclusion de tout contrat qui est visée quelle que soit sa nature ou son importance. Certes, au vu des opérations commerciales douteuses d’une grande ampleur financière, l’APEA avait raison de retenir un besoin de protection auquel une curatelle de coopération pourrait répondre. Cependant, pour parer au risque d’opérations hasardeuses il était suffisant de limiter le consentement du curateur de Dame A aux contrats dépassant un certain montant. La décision cantonale est annulée.

En revanche TF ne tranche pas la question abstraite de savoir si une curatelle de coopération qui porterait sur tous les actes de la personne concernée respecterait les principes de proportionnalité et de subsidiarité que l’APEA doit respecter quand elle détermine les tâches à accomplir en raison d’un besoin d’aide. La question reste donc ouverte.

Commentaire
Voilà une juste application du principe de proportionnalité

Le droit de la protection de l’adulte a l’ambition de promouvoir des mesures sur mesure c’est-à-dire qui épousent étroitement les besoins de la personne ; ce serait parfait si cela se produisait en première instance.

Référence
5A_537/2022 du 15 février 2023